Radoine HAOUI _ portrait _insta

Bonjour, pouvez-vous nous expliquer quels sont vos liens avec le Centre Hospitalier ?
Bonjour ! Alors je suis médecin psychiatre et j’ai travaillé au centre hospitalier pendant presque 25 ans. J’ai exercé des fonctions de praticien hospitalier, de chef de service, de chef de pôle et de président de la commission médicale d’établissement. Donc je connais très bien l’hôpital et aussi la mémoire de l’établissement !


Entretenez-vous une relation particulière avec le patrimoine de l’hôpital ?
Oui, j’ai toujours été très intéressé par le patrimoine de l’hôpital parce que je considère que c’est aussi le patrimoine des toulousains. Tout d’abord en tant que patrimoine architectural : on reconnaît bien l’architecture typique de notre ville. Mais aussi parce qu’il fait partie du patrimoine historique. Il s’inscrit dans l’histoire de la psychiatrie, qui est notre histoire aussi, de par les personnes qui l’ont faite. Certains personnages, ici à Toulouse, ont rayonné dans le monde entier sur ces thématiques. L’existence même de cet établissement témoigne de la transition entre le rejet des « fous », traités comme des parias, et la création du statut de malade mental, leur reconnaissance et leur prise en charge.


On imagine un début des travaux en 2023, à quoi pourrait ressembler la chapelle demain ?
Je pense que tout est possible. J’imagine cette chapelle comme un espace convivial qui soit un lieu d’échange et de communion entre usagers*, citoyens et professionnels. Il est essentiel de toujours chercher à créer du lien entre ces groupes pour pouvoir déconstruire les représentations négatives de la maladie mentale et changer l’image de la psychiatrie.
Une chose que je dis toujours sur la psychiatrie, c’est que ce n’est pas la discipline des faits divers. La maladie mentale affecte un français sur cinq, donc ça veut dire qu’elle peut toucher tout le monde. C’est une maladie comme une autre et il est temps que nous prenions exemple sur les pays d’Europe du Nord et que nous l’acceptions telle qu’elle est : une maladie chronique au même titre que le diabète ou l’hypertension. Et cela ne peut se faire qu’à travers les rencontres, l’écoute et le dialogue. On le fait déjà lors des SISM (Semaines d’Information en Santé Mentale) une fois par an, mais la chapelle permettrait de le faire tout au long de l’année. On pourrait organiser des moments privilégiés pour ces discussions, des tables rondes, des témoignages, des débats…
L’objectif est d’ouvrir l’hôpital. Parce que la maladie psychiatrique ne se résume pas à un enfermement ou des soins sous contrainte. 80% de nos prises en charge se font en dehors des murs de l’hôpital aujourd’hui (en CMP, en consultations ambulatoires etc). Nous sommes dans la cité. Fermer l’hôpital c’est enfermer les usagers, revenir en arrière. On ne veut pas de ça, on cherche à ce que la société soit plus informée et les usagers plus intégrés. Ils et elles sont des citoyens également.
Le projet de rénovation de la chapelle revêt donc une importante primordiale car il porte ces espoirs et vient soutenir plus que jamais le travail autour de la déstigmatisation essentiel pour changer le regard de la population sur les maladies mentales et sur notre discipline

 

*On nomme usager et usagères les personnes qui utilisent les services de soins. Ceci ne s’applique pas qu’à la psychiatrie mais à tous les services de soins. Pour certains, le terme peut sembler avoir une connotation consumériste péjorative, mais il a été choisi par les usagers eux même pour remplacer le mot patient qui transmettait une image de passivité d’un individu recevant des soins par rapport à un soignant qui les réalise, et donc un déséquilibre entre soignant actif et usager passif. Ainsi, même si le terme patient est toujours utilisé, certains préfèrent le terme usager qui permet de se positionner plus en tant que citoyen utilisant un service, d’égal à égal avec les soignants.