Plusieurs rapports récents alertent sur une recrudescence des placements en chambre d’isolement et des mesures de contention physique en psychiatrie.
Depuis janvier 2016 et pour la première fois en France, l’article 72 de la loi de modernisation du système de santé vient encadrer ces mesures par la mise en place, dans chaque établissement de santé mentale, d’un registre recensant ces pratiques.
Les hôpitaux et cliniques spécialisés, membres de la fédération de recherche en psychiatrie et en santé mentale d’Occitanie (FERREPSY) souhaitent aller plus loin et lancent un programme de recherche médicale et soignante sur le sujet.
La contention physique : pas de démonstration d’efficacité clinique
et un vécu essentiellement négatif pour les patients
Si la contention physique est une pratique fréquente en psychiatrie, elle reste très peu abordée dans la littérature scientifique. Les rares études sur le sujet ne permettent pas de prouver son efficacité thérapeutique et mettent l’accent sur ses nombreux effets secondaires.
C’est ce constat qui a poussé, en 2014, le Dr Raphaël Carré, Psychiatre au centre hospitalier Gérard Marchant à Toulouse, à choisir pour sujet de thèse l’étude du vécu des patients face à cette procédure.
Selon son étude, la contention physique est corrélée à un vécu essentiellement négatif pour le patient. Les thèmes d’agressivité et de violence, d’impuissance et de dépendance, de punition et de sanction, le sentiment de déshumanisation sont récurrents dans les témoignages recueillis.
C’est à la suite et en complément de cette étude que la FERREPSY a choisi d’orienter ses premiers travaux de recherche sur l’usage de la contention en psychiatrie.
Un programme de recherche pour caractériser les situations de recours à la contention
L’observation des situations de recours à la contention physique en psychiatrie fait apparaître de grandes disparités d’un établissement à un autre et parfois même entre services d’un même établissement. L’étude prospective, coordonnée par le Dr Radoine HAOUI, Président de la Conférence régionale des Présidents de CME, et le Dr Raphaël Carré en partenariat avec l’Observatoire Régional de la Santé Midi-Pyrénées, devra permettre de caractériser ces situations.
Elle impliquera les treize établissements membre de la FERREPSY : le CH Ariège Couserans (09), le CH du Gers, le CH de Lannemezan, le CH de Lavaur (81), le CH Gérard Marchant (31), le CH de Montauban (82), le CH Sainte Marie de Rodez (32), le CHU de Toulouse (31), la Clinique Beaupuy (31), la Clinique d’Aufrery (31), la Clinique des Cèdres (31), la Fondation Bon Sauveur d’Alby (81), l'Institut Camille Miret (46).
Pour décrire le contexte de l’utilisation de la contention physique, deux outils seront mis en œuvre :
- un outil qualitatif afin de documenter les situations dans lesquelles est utilisée la contention physique par l’étude du discours des médecins et soignants sur le sujet ;
- un outil quantitatif afin de fournir des données épidémiologiques et cliniques quant aux patients exposés à cette mesure.
Des enjeux importants pour la recherche en santé mentale
Une journée de lancement est prévue le 15 septembre prochain au Centre hospitalier Gérard Marchant et devrait permettre de présenter l’état des connaissances sur le sujet et la méthodologie de recherche adoptée (programme en pièce jointe)
A moyen terme, ce programme devrait fournir les premières données françaises sur le sujet et permettre ainsi une comparaison avec la littérature médico-scientifique internationale.
Un préalable indispensable à la construction d’un outil de vigilance et à une réflexion sur les pratiques médicales et soignantes.